Le rétrofit BioGNV, ou comment décarboner rapidement la mobilité
Répondant à l’invitation de GRDF, plusieurs organisations ont accepté de partager leur point de vue et leurs contributions sur le rétrofit BioGNV, à l’occasion de Solutrans 2023. Retour sur la conférence justement intitulée « Le rétrofit BioGNV, levier majeur de décarbonation ».
Dans la course contre la montre que représente la transition énergétique du transport (de marchandises et de voyageurs) et, plus largement, de la mobilité, le rétrofit a le vent en poupe. Concernant toutes les catégories de véhicules (VUL, poids lourds, autocars, bus, pour ne parler que de la route), il consiste à convertir un moteur (diesel le plus souvent) vers une autre énergie.
Moins médiatisé que le rétrofit électrique, le rétrofit BioGNV monte en puissance. La solution technique facilitée par un arrêté du 12 septembre 2023, paru au Journal officiel du 24 octobre 2023, l’obligation de solliciter l’avis technique préalable du constructeur a été abrogée pour toute opération de rétrofit. Transformer 600 000 VUL au BioGNV permettrait d’économiser entre 4 et 5 millions de tonnes CO2 par an. C’est un tiers de l’objectif de réduction dédié aux véhicules de moins de 3,5 t à l’horizon 2030.
Une solution pertinente en termes d’usage et de coût
Comme le rappelle Marc Charlet, directeur général du pôle européen de compétitivité Nextmove, « Il y a deux axes pour décarboner le parc : les usages (et notamment l’écoconduite, le covoiturage, la digitalisation de la mobilité) et les véhicules. »
Parmi les chantiers concernant les véhicules, le rétrofit BioGNV est une des solutions que le pôle de compétitivité étudie avec le plus grand sérieux. « Cette solution nous semble très intéressante en termes de business model et de coût. Notre souhait est d’accompagner des projets collaboratifs visant à trouver des solutions techniques pour accélérer la décarbonation du parc grâce à cette solution rétrofit BioGNV. »
L’OTRE, fédération de transporteurs qui rassemble plus de 3 200 entreprises du secteur marchandises et quelques dizaines d’entreprises du secteur voyageurs est une partie prenante très active. « Les enjeux de transition énergétique du transport sont extrêmement importants et le verdissement de nos flottes est un élément central de nos travaux », rappelle son délégué général Jean-Marc Rivera. La construction de la feuille de route du transport avec d’autres fédérations a conduit à cette évidence : « Nous avons rapidement compris que pour le transport routier – qu’il soit lourd ou léger - il ne fallait penser que par l’électrique. Notre objectif, au cours de ces deux dernières années, a été de démontrer que l’objectif du 100 % électrique ne pouvait pas être tenu. Nous avons besoin de maintenir un mix énergétique. »
Le sujet du rétrofit s’est également imposé dans le débat. Dans certains secteurs d’activité (comme le déménagement ou les travaux publics) où la conduite n’est pas le point clé de leur activité, la durée d’exploitation des véhicules peut dépasser les 10 ans. « De fait, la question du rétrofit est devenue centrale. Nous nous sommes penchés sur le rétrofit gaz parce que dans le monde du poids lourd, aujourd’hui, l’énergie alternative la plus développée c’est bien le BioGNV », souligne le délégué général de l’OTRE.
Côté utilitaires, la longévité des véhicules est également un sujet de préoccupation. Au nom de la Capeb qui représente 600 000 artisans du BTP, Olivier Castells insiste sur la nécessité pour les artisans du bâtiment de disposer de véhicules présentant des autonomies suffisantes. « Les véhicules électriques ne répondent pas à notre usage, car chargés, l’autonomie tombe à moins de 150 km. Pour entrer dans les villes, et particulièrement les zones à faibles émissions (ZFE), nous devons pouvoir disposer de véhicules Crit’air1. Le rétrofit BioGNV nous permet de conserver nos véhicules, avec leur potentiel de charge utile et d’autonomie, tout en arborant cette précieuse vignette. » Sur le plan économique aussi, la solution s’avère intéressante. « En termes de coût, remplacer son véhicule actuel par un électrique n’est pas à la portée de tous les artisans. Le rétrofit gaz ne coûte que quelques milliers d’euros. » Enfin, par nature, les artisans cherchent à faire durer leurs matériels. Les VUL utilisés par les artisans du bâtiment ont une durée de vie supérieure à dix ans. « Si nous pouvions réduire notre poste transport en recourant au rétrofit BioGNV, cela nous aiderait à améliorer nos résultats, chahutés dans le contexte économique actuel. La tendance dans nos métiers, c’est plutôt d’aller vers une amélioration de l’existant. »
Plus d’un tiers du gaz carburant est déjà du BioGNV
La question de la disponibilité du gaz pour la mobilité est souvent soulevée. Pourtant les faits prouvent que cette solution est totalement efficiente et prometteuse pour l’avenir.
« Pour les transporteurs, les chargeurs, les artisans, le BioGNV est une solution efficace, économique et disponible, souligne Erwan Cotard, président de France Mobilité Biogaz (ex AFGNV). Que ce soit pour un véhicule neuf ou un véhicule rétrofité, les utilisateurs n’ont aucun problème d’approvisionnement à craindre. Le BioGNV – carburant 100 % renouvelable, représente déjà 36 % de la consommation de gaz carburant comprimé (GNC).
C’est une solution très concrète, qui vient des territoires et a d’énormes atouts à faire valoir en termes de souveraineté économique. » Le BioGNV est, rappelons-le, la seule énergie renouvelable à avoir dépassé les objectifs de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
« En une dizaine d’années, la filière a été en capacité de développer 12 TWh de gaz renouvelables injecté dans le réseau, soit un peu plus que la production de deux réacteurs nucléaires. C’est une dynamique formidable qui est lancée », rappelle Jean-Jacques Raidelet, directeur des marchés chez GRDF. L’ambition de 100 % de gaz vert en 2050 pour couvrir l’ensemble des besoins de gaz en France est affirmée. « Selon nos projections, la consommation totale à cette échéance serait de 320 TWh en mettant en œuvre les différentes technologies matures ou en maturation. La France dispose d’un gisement de 420 TWh. Il y aura donc bien du gaz vert pour tous les usages, y compris la mobilité ! »
En résumé, les arguments en faveur du rétrofit BioGNV sont nombreux : c’est une solution peu onéreuse pour les utilisateurs finaux (transporteurs, artisans….), qui peut s’appliquer à la mobilité lourde comme à la mobilité légère, et qui entre dans les objectifs de décarbonation et d’amélioration de la qualité de l’air. Pourquoi attendre ?